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L'outback australien se raconte à vélo


Ecrit par Emeline

Du  19 juillet au 31 août  2019


 

"Tu en penses quoi ?"

"Je sais pas trop..."

"Beh là je sais plus trop non plus et toi ?"

"Mmh ça pourrait être sympa non ?"

"Oui... alors ? On le fait ce détour?"

"Ça va être joli?"

"J'espère !! "

"Pour être sûr, faudrait aller voir ?"

"Et puis c'est un peu un symbole d'aventure cette île?"

"Bon on le fait ce joli détour en Australie ?"

"Vendu !!"

 

Après la nouvelle Zélande et avant de nous envoler pour l'Amérique du Sud, nous décidons de profiter de nos 3 mois de visa touriste pour traverser l'Australie du Nord au Sud, de Darwin à Adélaïde en passant par Uluru (un détour de quelques 800km) et découvrir "l'outback". Retrouver ensuite l'océan et le longer jusqu'à Melbourne.

Introduction et curiosité australienne

 

La différence est grande après l'hiver en NZ. À Darwin nous atterrissons aussi dans l'hiver mais il fait chaud ! Nous ressortons short et teeshirt.

 

Après 2 nuits de repos passées chez Helen, notre hôte warmshower, nous remontons sur les vélos en direction D'Alice Springs à quelques 1700 km de Darwin.

 

Ici tout est surdimensionné : le pays, les voitures, les 4x4, les caravanes, les fameux road train (camions de 3 remorques, parfois 4), et les distances. Pour traverser l'Australie du Nord au Sud avec nos détours prévus il ne nous faudra pas moins de 5 500 km (à la louche) en 3 mois.

L'Australie représente 14 fois la France... Autant vous dire que ça va pédaler dur...on se reposera en Amérique du sud (...ou pas me souffle-t-on dans l'oreillette).

 

Grand changement par rapport à la Nouvelle-Zélande aussi : l'eau. Finies les fontaines et rivières sur la route. Nous sommes en hiver mais c'est la saison sèche, il ne pleut donc pas et les rivières sont à sec. Nous comptons donc sur les stations-services (ou road house) et aires de repos. Bien loin de celles de chez nous.  On peut compter trouver de l'eau tous les 100km environs. 

Ici la "road house" est à la fois une station-service, un pub où l'on peut donc boire et manger, parfois un mini magasin, un hôtel et un camping. Quant aux aires de repos ou "rest area", ce n'est souvent qu’un grand parking de terre et donc de poussière, avec quelques tables de picnic, un énorme tank d'eau non potable et parfois des toilettes. On peut aussi y dormir gratuitement.

 

Traverser l'Australie à vélo nécessite aussi de regarder où l'on peut acheter à manger. Information essentielle quand on voyage à vélo et qu'on pense à manger à longueur de journée ! Malheureusement pour nous les magasins sont souvent espacés de quelques 600/700 bons kms. Nous portons donc de la nourriture pour 7 jours. On fait simple mais efficace. 

Pour le petit dej : café/thé, avoine, sucre et fruits secs. Le midi nous cuisinons des pâtes ou du riz et le soir lentilles ou semoule. Agrémentés de boîtes de thon ou de sauces déshydratées voir d'oignons ou de carottes au début.

 

Menu peu variés, alors quand nous arrivons dans une ville avec un supermarché digne de ce nom... bim... on dévore ! Surtout que les campings en ville sont organisés pour des cyclos affamés : cuisine très souvent bien équipée avec BBQ et frigo !!

 

Et concernant les bivouacs ? Rien de plus facile ... On repère des arbustes ou arbres, on fait 50/100 mètres à droite ou à gauche et on pose la tente. Au début nous dormions dans les rest areas où on peut camper gratuitement, plus par peur des feux de Bush et des animaux sauvages (dont serpents). Mais être entourés de caravanes et 4x4 claquant des portières et faisant tourner leur moteur plus que nécessaire nous a vite fait préférer le camping sauvage !

 

C'est donc chargés d'eau et de nourriture que nous prenons la route.

 

A la découverte de la Stuart Highway

 

Je le sais depuis ces nombreux mois que nous sommes sur la route, mais ces kms sur cette "Stuart Highway" me le prouvent encore… Quel merveilleux outil que notre corps... nous sommes faits pour nous adapter et être en mouvement.

La dernière heure et les derniers kms sont parfois un peu long... les 1ers jours c'était passé la 4ème heure et les 70km, de jour en jour nous augmentons sans nous en rendre compte, et parce que nos corps l'acceptent aussi, les heures à pédaler et les kms... ces derniers jours c'est plus de 6h et 100km passés sur la selle au son de nos playlists et podcasts...

 

Nos journées se répètent avec les habitudes "bushiennes". Nous y trouvons nos repères et ainsi une certaine sécurité? Je pourrais vous raconter tous ces jours passés à rouler vers le Sud... mais je vous ennuierais pour sûr, tant ces journées se ressemblent.

 

Au programme :

- Réveil 6h / 6h30 en fonction de la motivation et départ 2 h après. Il ne fait pas trop chaud et le vent n'est pas encore là. On roule juste en débardeur et crème solaire. 

- 10h30 pause fruits secs, on enfile nos chemises pour se couvrir les bras et épaules et on repart sur les vélos avec de la musique et avec un léger vent de face.

 - 12h30 / 13h avec souvent 50 bornes au compteur : pause midi picnic lecture pour 1 bonne heure.

 - Aprèm : écoute de podcast, et vent de face plus fort. La dernière heure est souvent un peu longue.

 - 16h30/17h : bivouac, douche en fonction de l'eau que l'on a avec nous, montage de tente, repas, lecture, contemplation d'un ciel étoilé de dingue... dodo.

 


 

Et sinon ? Mais sinon ? C'est comment ?

 

Le bush n'est pas "joli" en soi, les pauses photos et vidéos ne se succèdent pas... et pourtant il y a un quelque chose qui me séduit dans ces longues lignes droites brûlées de soleil où tout le monde s'écarte pour laisser la place à ces road trains, où nous retenons nos souffles à l'odeur âcre et nauséabonde des cadavres de vaches et kangourous qui parsèment les bords de route, où le vent de face nous fait appuyer plus fort sur les pédales et nous assèche la peau et les lèvres... où encore les mouches qui s'amassent par centaines dès que nous nous arrêtons (nous avons donc une charmante moustiquaire de tête !)

 

Les paysages semblent se ressembler et pourtant à la lenteur de nos tours de roues, nous en apercevons de subtiles variations. La couleur de la terre est un peu plus rouge ou plus orangée ou plus sablonneuse... Les arbustes tantôt disparaissent, réapparaissent plus grands ou plus brûlés... Et ces milliers de termitières...

Il y aurait presque quelque chose de spirituel dans tout ceci... de mystique… Seules ne changent pas les couleurs des couchers et levers du soleil et du ciel étoilé… Ils font partis des plus beaux que nous ayons rencontrés. (Saviez-vous que la voie lactée en anglais se dit Milky Way?)

 

 

Et puis aussi et surtout réaliser que nous sommes en train de traverser l'Australie à la force de nos jambes me plait... alors le décor suit cette idée...

 

// Pour la petite anecdote : je pose mon pied et mes roues sur la Stuart Highway et me range sur le bas-côté pour prendre en photo le panneau. 2/3 caravanes et vans me dépassent... je me revoie encore penser et dire à Olivier " ils sont partis traverser l'Australie en voiture du nord au sud sur pas loin de 3500km... ils sont fous" avant de me rendre compte que j'allais faire la même chose mais à la force de mes jambes avec mon vélo...et curieusement cela m'effraie moins de le faire à vélo qu'en voiture ... //

 

Et le reste surtout le reste... les gens, les australiens, et tous les touristes. Ce sont EUX ... qui nous donnent de l'énergie sans s'en rendre compte... une part de gâteau mis dans nos mains pour la route, un carré de chocolat noir offert pour notre dessert dans un camping, une boisson fraîche dans une caravane, 2 bouteilles d'eau fraîches qui nous attendent en haut d'une petite montée (ne croyez pas que la Stuart Highway est plate), des invitations (des vraies pas jetées en l'air = coordonnées écrites sur un papier remis en main propre), et tous ces signes de la main, ces pouces levés, ces klaxons, ces questions ...

 

Tout au long de cette Stuart Highway nous essayons de profiter de détours sympas :

 

Ce sera au tout début du parcours : Litchfield park et ses cascades et piscines naturelles rafraîchissantes parfaites après une journée de vélo. Nous y serons pendant des vacances scolaires, les campings sont complets mais nous trouvons toujours (et par chance un peu) une place pour notre petite tente.

 

 

Ce sera aussi le site de Karlu Karlu où d'énormes rochers de toutes formes viennent se dresser au milieu du désert. Une sorte d'oasis au milieu de cet outback.


Nous arrivons à Alice Springs où nous nous reposons 3 nuits et squattons cuisine et bbq du camping avant de reprendre notre route vers le sud avec un détour vers l'ouest 

Au travers de la magie d'Uluru et de Kata Tjuta via Kings canyon

 

"Kings canyon", "Uluru"... Des "must do" semblait il... pourtant peu fans des circuits touristiques, nous décidons d'aller y faire un détour. Surprenant ? Oui nous aussi, cela nous étonne... Mais Uluru, ou ce gros caillou rouge au milieu de nulle part, nous intrigue...

 

Départ D'Alice Springs - Kings canyon - Uluru - retour sur la Stuart Highway ... un peu moins de 1000 km. Un détour, un vrai!

 

On se charge pour 12 jours de nourriture, le temps d'arriver dans un supermarché avec 1 jour et demi de marge... les sacoches sont pleines à craquer et pèsent leur poids... plus de gâteaux, remplacés par du ...riz et des pâtes ! (l'arnaque !)

 

1ère étape jusqu'à Kings Canyon la "Mereenie loop" : on prend la "Namatjira drive" le long d'une vallée où s'échappent des petites gorges. Plusieurs arrêts pour en profiter. On pourrait même s'y baigner mais on passe notre tour... l'eau est froide et il ne fait plus très chaud.

 

La route est bonne et asphaltée, les bivouacs faciles à trouver avec les belles couleurs de coucher et lever du soleil.

 

 

A Glen Helen nous nous chargeons en eau car nous allons traverser une réserve aborigène de 220 km dont 160 de piste sans aucun point d'eau. 10L pour Olivier et 8 pour moi dans une vache à eau tout neuve achetée à Alice Springs, plus quelques bouteilles accrochées sur nos sacs. Il s'agit malheureusement de "bore water", une eau qui vient du sol et qui est plus ou moins salé. Et ici c'est plutôt plus ... A nous deux, nous avons un peu plus de 25L d'eau... insuffisant pour les 3 jours dont nous avons besoin pour arriver à Kings canyon, prochain point d'eau...

 

Alors comment avons nous fait? De la façon de plus simple possible... Nous avons cherché l'eau là où elle était... c'est à dire ... dans les gros 4x4 croisés! En vrai on n’a quasi pas eu besoin de demander, les gens s'arrêtaient d'eux même ! On a donc, au fur et à mesure, allégé nos vélos ! 

 

Pas vu d'aborigènes mais des chevaux sauvages et des dromadaires ! On a repris des muscles sur la piste, oubliés sur les routes peu pentues et asphaltées de la Stuart Highway : de la tôle ondulée, un peu de sable, des cailloux, des montées et descentes,  beaucoup trop de poussière... On avait presque oublié ce que c'était ! Erreurs de débutant : 1 vis de sacoche de perdu (oublié de les resserrer le soir), la nouvelle vache à eau percée (posée au sol alors qu'il y avait des petites épines)... On a même connu un bon vent de dos ... qui s'est retourné contre nous à cause de la route...

 

Les paysages ont radicalement changé depuis notre départ d'Alice Springs, nous voyons plus de virages, des formes aux paysages, des montées et des descentes,...

 

Arrivés au camping de Kings canyon direction douche et lessive, direct...

Ma chemise rose commence même à avoir du mal à redevenir propre... 

 

Le lendemain, nous et nos vêtements tout propre, nous allons nous ballader. Ce Canyon est effectivement impressionnant. Nous choisissons la randonnée qui le longe d'en haut et permet d'apprécier de beaux points de vue ... la roche est rouge et les paysages sont secs.

Après Kings Canyon, c'est au tour d'Uluru et de Kata Tjuta de nous impressionner.

 

Ou le retour chez Disneyland avec bus de jap’ et chinois à gogo... Bon... ça vaut vraiment le détour !!

 

3 jours dans le parc à admirer ses couleurs et gigantesques montagnes vue de nos vélos et nos baskets ! Nous y passerons 2 nuits ... en mode commandos... car des signes "no camping", "overnight prohibited" jalonnent le parc... (Chut on dit rien !). Le problème c'est qu'à vélo ce parc est impossible à faire sans y passer la nuit. J'en ris encore de nous revoir attendre qu'il n'y ait plus de voitures et courir avec nos vélos dans le bush sur 50/100 m pour nous planquer derrière des arbres et s'enfoncer au milieu des forêts pour s'y planquer avec notre tente. Petite frayeur la 2ème nuit quand on s'aperçoit qu'on est dans une clairière et non abrité du ciel et ... sur la route des hélicos !

 

Le site de Kata Tjuta, c'est une énorme falaise faite de rochers tout en rondeurs.  Nous y randonnons toute la matinée avant de reprendre nos vélos pour Uluru impressionnés par ces formations rocheuses.


 

ULURU : Et c'est l'enchantement... Nous nous contentons de pédaler autour du caillou sans y grimper. Malgré les nombreuses pancartes "nous vous déconseillons d'y grimper car Uluru est sacré" de nombreuses personnes y grimpe quand même. C'est bien contents que le matin où nous y sommes, le sentier pour y grimper est fermé pour cause de vent violent. Bien fait!

 

J'imaginais ce cailloux tout lisse et suis bien étonnée de le découvrir plein de trous, de creux, de formes... changeant de couleurs au cours de la journée.

 

Magique...c'est bien le mot !

Et une belle surprise nous attend sur le chemin du retour vers la Stuart Highway : un petit lac salé derrière une dune !

 

C'est après cette parenthèse touristique que nous prenons la route de la célèbre "Oodnadatta track", une piste de 600 km dans l'outback australien.

 

Pour en voir plus, c'est par là :


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Commentaires: 1
  • #1

    Jean Pierre et Annie (jeudi, 19 septembre 2019 11:06)

    Bonjour, merci pour ces récits de votre périple néo-zélandais et australiens. Vous nous faites rêver.Votre carte tient compagnie à des hippos... Nous revenons de 4 jours de randonnée en vélo sur le Causse lotois (performance modeste et chambre et table d’hote en guise de camping sauvage) et faisons les valises pour Vientiane. Nous partons mercredi prochain!
    Bon vent ( dans le dos de préférence) et à bientôt le plaisir de vous lire et de vous revoir l’année prochaine dans le Sud Ouest � Bisou de nous